jeudi 9 mai 2019

La dernière tentation du Christ – Martin Scorsese 1988

Je me souviens du scandale que le film a suscité, de la violence  dans laquelle se sont jetés conservateurs et catholiques de tout poil, pour dénoncer un film délétère et blasphématoire. Le spectre de l'intégrisme religieux avait brusquement resurgi, entraînant le pays dans une hystérie collective et une effusion de passions. Une salle de cinéma incendiée, et le film fut pratiquement retiré de la distribution. J'ai eu tout juste le temps d'aller le voir dans une petite salle de cinéma indépendante... Le déchaînement de haine cristallisé autour de Martin  Scorsese  m'avait profondément révulsé, écœuré.  Et puis, comment pouvait-on  se targuer de critiquer un film sans l'avoir vu ?  Bien sûr, ce qui était reproché au film, c'était de donner une interprétation très personnelle des Évangiles, d'avoir descendu le Christ de son socle divin, de l'avoir désacralisé et l'avoir ramené à sa condition d'homme. Jésus est présenté dans La Dernière Tentation du Christ, non comme un Dieu, mais comme un homme  qui doute de sa mission salvatrice. Ce qui provoqua les foudres de l'Église catholique, avec à sa tête, le cardinal  Albert Decourtray, qui expliquait dans un communiqué, et sans avoir pris la peine d'aller voir le film,  que «la mort de Jésus n’appartient pas aux romanciers, ni aux scénaristes...» ! Fin de la discussion. Alors pourquoi faire du Christ  un homme tourmenté, rongé par le doute, obsédé par ses propres désirs,  pourquoi l'avoir finalement rendu humain, bien trop humain ? Une hérésie pour notre bienveillant clergé...
Et pourtant, toute la force du film est là, bouleversante, renversante. Martin Scorsese fait la démonstration que la Parole des Évangiles n'est pas une parole dogmatique et intemporelle. La foi est une affaire hautement et éminemment personnelle, une mise à l'épreuve, nourrie par notre propre expérience. Les scènes les plus audacieuses, les plus courageuses sont celles où l'on voit Jésus faire l'apprentissage de sa propre foi. C'est vertigineux. Le dernier plan, qui m'a laissé sans voix, donne tout son sens à ce film tant décrié. 

Kermite.





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