
Après avoir vu ces images, je me suis longtemps
demandé, pourquoi les nazis avaient tourné cet étrange film
(inachevé) entièrement composé de séquences muettes et destiné
à nous dresser un état des lieux de la vie dans le ghetto de
Varsovie. Eux qui considéraient les Juifs comme des dégénérés,
des parasites, des moins-que-rien, et les plaçaient tout au bas de
l'échelle raciale, parmi la race des "sous-hommes",
(Untermenschen)
pourquoi se donnèrent-ils finalement la peine de les filmer ? Oui,
pourquoi ??
La réponse à cette question est loin d'être aussi
claire et évidente. Quelques éléments de réponse sont apparus
quand on a récemment découvert une cinquième bobine, à partir de
laquelle on s'est aperçu que, ce qu'on prenait pour un document brut
et historique (sur la vie quotidienne des Juifs dans le ghetto de
Varsovie) était en fait le résultat d'une mise en scène savamment
orchestrée par les nazis. La manipulation des images est d'autant
plus réussie qu'elle passe quasiment inaperçue dans certaines
scènes. Les nazis poussant l'outrecuidance et le cynisme jusqu'à
décider eux-mêmes de la disposition et de l'orientation des
cadavres jonchant les rues. Et là, bien évidemment, le film prend
une tout autre dimension, puisque s'articule autour de lui, le
pouvoir subversif des images, associé à une manipulation de la
réalité en vue d'étayer ou de corroborer une opinion, une
doctrine, une croyance. Ce qu' aujourd'hui, nous appelons
communément propagande.
Pourtant,
à la réflexion, la propagande n'explique pas tout ici, et dans le
film, certaines séquences la desservent même totalement. Que
penser, par exemple, de la façon dont les nazis filmaient les
charniers ? Tout simplement écoeurant. Ces corps décharnés jetés
sur des charrettes de fortunes, et amenés jusqu'aux fosses communes,
la façon méthodique d'empiler les cadavres, tout cela relève du
macabre, de l'ignominie, de l'horreur, et confirme, pour le coup, que
l'idéologie nazie, loin de se draper dans ses plus beaux oripeaux,
prend racine dans la barbarie dont elle se nourrit sans
vergogne.
Mon sentiment personnel est que ce film sonne comme
une messe funèbre captant les derniers feux d'une population
inexorablement vouée à l'extinction et à l'extermination. À l'image de certains scientifiques osant préserver ad
vitam æternam dans le précieux
formol, les anomalies criantes de certains êtres vivants, les nazis
ont voulu, peut-être, fixer sur pellicule le monstre biologiquement
hybride et dépravé, que le Juif représentait à leurs
yeux.
Bonus :
- Un dossier de presse
concernant une exposition sur la Photographie (juive et allemande)
dans les Ghettos, et réalisé pour le compte d'une exposition
du Mémorial de la Shoah.
(pdf)
- Un dossier pédagogique sur les camps et la Shoah vu par
les nazis. (pdf)
Kermite.
Lien :
https://uptobox.com/xb3dxpie2p1u
https://1fichier.com/?uwsz23ta7psbphjoutsa
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